Tous les frais sont supportés par les habitants du village. Aux termes d'obligations imposés par la charte de 1511, ainsi que par différents règlements, il incombe â la population d'entretenir deux aires de chasse, une aire d'oiseaux, de participer gratuitement en tout temps aux chasses, cela autant de fois que le désir le seigneur ou son représentant.
C'est à travers les différents rapports adressés aux Ducs de Lorraine par ]es habitants, qu'il nous est permis d'entrevoir la valeur de la chasse de Bisping et ce qu'elle a été durant la deuxième moitié du 17ème siècle.
Les premiers habitants venus repeupler le village après la guerre de Trente Ans, se plaignent de l'insécurité permanente de leur famille. En effet, de nombreux loups enlèvent les bêtes qui sont en vaine pâture, et rendent le travail dangereux dans les bois et la campagne. En conséquence, les habitants demandent d'être exonérés de certaines redevances aussi longtemps que le péril des loups sera une entrave à la vaine pâture et au travail.
Les loups ne sont plus chassés durant la période d'abandon du village, plus de 20 ans, de même que pendant une quinzaine d'années après, le peu d'habitants ayant d'autres soucis. Les loups deviennent un danger permanent et détruisent une grande partie du gibier. La chasse n'a plus que peu de rapport et les autres revenus de la Seigneurie sont subordonnés à la reprise normale de l'activité des habitants.
Cet état de fait, incite le Duc de Lorraine, conscient de son intérêt à prendre des mesures telles que l'autorisation de chasser les loups tout le temps, d'accorder une prime par bête abattue ou capturée.
Stimulés par ces mesures, armés de quelques instruments de chasse, les habitants creusent de nombreuses louvières sur les passages présumés des loups. Les louvières sont de profonds fossés étroits â parois verticales et recouverts de brindilles. Les loups principalement en hiver y sont attirés par des appâts et lors des grandes chasses les rabatteurs poursuivent les bêtes vers les louvières d'où elles ne pourront sortir, Les loups sont de cette façon facilement abattus ou capturés. Il en est de même pour les sangliers.
Après la disparition des loups, la prolifération du gibier redonne de la valeur à la chasse, certains habitants y ont même pris goût L'ordonnance du Duc, rappelle l'interdiction du braconnage.
1730, le Duc de Lorraine échange la Seigneurie de Bisping contre une ferme à Willerwald. Ferme appartenant â deux enfants mineurs Antoine et Marie Jeanne de St FELIX, seigneur de MARIMONT, jusqu'en 1789, les membres de cette famille chasseront à Bisping Dans plusieurs de leur plaid annaux, ils rappellent l'interdiction du braconnage, ainsi que la chasse d'animaux nuisibles sans autorisation. Mais il n'est pas fait mention des sanctions appliquées telles que pour les autres délits.
La famille de ST FELIX a fait preuve d'une grande tolérance même pour la chasse Les habitants ne leur ont témoigné aucune hostilité à la Révolution, et quelques années plus tard la municipalité adonné un avis favorable à la restitution de leurs biens propres.
1789, neuf fusils de chasse sont déposés à la mairie.
Les fréquentes chasses, les primes accordées par le comte et celles données sur sa demande par la municipalité, ont largement contribué à l'élimination des loups dans les bois des environs. Il en reste quelques uns, mais le danger n'est plus comparable à ce qu'il était. Néanmoins, durant les hivers particulièrement rigoureux, il arrive que de grandes bandes de loups envahissent la région. Selon certaines personnes, ces loups viendraient de pays lointains Hongrie, Roumanie. Poussés par la faim enhardis par le nombre, ils arrivent de nuit dans les villages, assiègent portes, fenêtres, lucarnes, ils tentent de s'introduire, Si tout est bien fermé, il ne reste aux habitants qu'à attendre leur départ à la venue du jour. On n'essaie d'éloigner les bêtes avec des torchons enflammés, Le danger est que la plupart du temps les loups ne manifestent pas leur présence. Celle-ci n'est décelée que par les tremblements de frayeur des chiens, ces derniers n'aboient pas, ou lorsqu'ils cherchent refuge près des personnes.
1790, la municipalité demande de ne pas se rendre seul à la messe de minuit, de se munir de lanternes et de brandons allumés ou incandescents. De plus, il faut s'abstenir de s'éloigner du village pour se rendre aux veillées même en prenant ces précautions Des feux seront allumés aux alentours de Bisping pour éloigner les loups. Cette situation dramatique ne se renouvellera plus à la fin du 18ème siècle, bien que des loups s'introduiront parfois à l'intérieur du village.
1810, un jeune homme de Desseling, militaire en congé est venu passer la veillée à Bisping. La neige recouvre la campagne, il fait froid. Les personnes chez lesquelles il a passé la soirée le dissuadent de retourner à Desseling. La nuit précédente, les habitants de Bisping ont entendu les hurlements des loups. Le jeune homme ne se laisse pas convaincre, et ne croit pas les dires. Il pense qu'il n'y a aucun danger par le beau clair de lune qu'il fait et si par hasard les loups arrivent, il saura se défendre avec son sabre.
Ce fanfaron ne devait plus revoir Desseling. Sa famille ne s'inquiète que les jours suivants, Mais la neige est tombée entre temps en abondance, a effacé toutes les traces. Le sort qu'a subi ce jeune homme ne fait aucun doute. Des battues sont organisées, et c'est au cours de l'une d'eues, que les débris d'une botte déchiquetée sont trouvés à “la fontaine de la rose”. Par ailleurs, Ion trouve des lambeaux d'uniforme à Languimberg, c'est la confirmation de ce que l'on pensait.
La chasse aux loups continue non seulement à Bisping, mais s'organise dans toute la région des bois et continue jusqu'au printemps. C'est l'anéantissement des loups à 90%.
Il n'y aura plus que très rarement des bêtes enlevées, probablement par des loups de passage.
En 1860, dans un compte rendu sur la chasse de Bisping l'inspecteur des Eaux et Forêts de Sarrebourg, indique que :
“la dite chasse est peuplée de lièvres, linottes, chevreuils, sangliers, mais qu'elle est parfois traversée par les loups”.
C'est aux environs de 1875, que date l'enlèvement des dernières bêtes, 3 moutons.
1890, le garde forestier de Bisping tue un loup d'une grandeur exceptionnelle. Un bûcheron est chargé de faire le tour du village avec la bête sur une brouette. Cela a été le dernier loup tué et vu sur la chasse de Bisping.
Quelques années auparavant un braconnier avait tué à ‘'la fontaine de la rose ‘' une louve, capturé deux louveteaux. Ces louveteaux seront élevés, l'un par un grand chasseur, le docteur MOYE de Dieuze, qui devra abattre la bête devenue adulte. Elle avait étranglé ses chiens de chasse. L'autre louveteau sera élevé par l'écrivain et châtelain d'ALTEVILLE, monsieur de GUAITA, ce louveteau restera docile.
Il va sans dire que la disparition des loups a revalorisé la chasse par la multiplication du gibier. Mais non dans les proportions que l'on était en droit d'espérer, cela à cause du braconnage du moins pour la période de 1789. En cette année, une des revendications inscrites sur les cahiers de doléances, est la liberté de la chasse, jusqu'alors privilège attaché à la Seigneurie.
La décision de louer la chasse même si c'est au profit de la caisse communale est une amère déception pour les habitants Cela leur paraît une atteinte à la liberté. La municipalité constate que c'est un transfert des droits de la seigneurie à des bourgeois fortunés.
De tout temps, le braconnage semble avoir été pratiqué même quand il pouvait amener aux galères, il n'a jamais été considéré comme infamant.
La décision de louer les chasses incite à une recrudescence du braconnage qui se trouve protégé par l'unanimité des habitants et notamment des laboureurs. Ces derniers n'admettent pas que le gibier qu'ils nourrissent aille aux bourgeois parce qu'ils sont fortunés. Dans le braconnier les habitants voient une protestation contre la loi, une sorte de justicier. Les locataires des chasses sont conscients de ce fait, persuadés qu'au moins la moitié du gibier leur échappera. Ils n'offrent donc qu'un prix correspondant, n'étant de cette façon pas lésés. Ils acceptent plus ou moins bien qu'une partie du gibier soit braconnée.
C'est également l'avis du Curé de Bisping, l'abbé SCHMITT qui s'est fait le pourvoyeur en gibier pour ses confrères de toute la région. A l'occasion, il dira aux braconniers professionnels “Procurez moi, pour telle date, un lièvre ou autre gibier”.
Les locataires n'en paient que la moitié, tout devrait appartenir à ceux qui nourrissent le gibier ; ce qui ne serait que justice.
“Vous m'en, apporterez de la moitié qui n'est pas payée par le locataire, puisque ceux qui le nourrissent sont d'accord. Dieu y est aussi”.
Les braconniers notifient au garde forestier communal ROBERT de ne pas être sur leur chemin. Ce n'est qu'après 1870, qu'il en sera autrement.
Les gardes prussiens des “Eaux et Forêts” exercent une surveillance très stricte Le prix d'adjudication des chasses ayant beaucoup augmenté, les adjudicataires embauchent des gardes chasses. Le braconnage au fusil et même au collet devient dangereux.
Les perdreaux sont introduits avec succès, il n'en est pas de même pour les faisans. Pour chaque nid de perdreaux épargné par les faucheurs, les locataires donnent des primes appréciables. Le nombre des perdreaux diminue sensiblement avec l'emploi des faucheuses Il en est de même pour les lièvres. Cependant, le grand nombre de terres en friche leur assurent un abri. Ce n'est qu'après la mise en culture de la plupart des friches qu'ils deviennent plus rares. Quant aux chevreuils à l'abri du braconnage, ils ont une peu augmenté, Les sangliers sont assez nombreux et de temps à autre des cers séjournent temporairement sur la chasse qui est alors considérée comme être une bien bonne chasse.
Dès l'An 1048, date présumée du transfert de la Seigneurie de Bisping aux Ducs de Lorraine, se sont les successifs Ducs, à l'exception de quelques courtes aliénations de la Seigneurie, qui ont joui de la chasse de Bisping, privilège y afférent. On ne sait s'ils sont venus chasser personnellement. L'éloignement de leur résidence laisse supposer que le droit de chasse avait été cédé.
La valeur de la chasse liée â l'abondance du gibier avant la guerre de Trente Ans n'est pas connue, Ce qui est sûr c'est que même peuplée de peu de gibier, elle représente un appréciable revenu.
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http://www.haut-koenigsbourg.net/loups/documents/moyena.htm]
Pour aller plus loin :
Le loup au moyen-âge
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Histoire de Bisping (57930)
Monographie de Marcel LALLEMENT
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